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Ressources / Eléonore
Chapuis / Marcel Griaule - Dieu d'eau
MARCEL
GRIAULE
DIEU
D'EAU - ENTRETIENS AVEC OGOTEMMÊLI
1966, PARIS, FAYARD
Dans
les villages dAfrique subsaharienne, les Anciens sont vénérés
comme des sages et les décisions sont prises après les
avoir consultés. Sur le plateau dogon du Mali, ils se retrouvent
avant le coucher du soleil, à lombre dun grand tamarinier
sous lequel ils rendent hommage aux ancêtres et se livrent à
des libations communes. Ils symbolisent la mémoire du groupe,
le savoir collectif des peuples et sont dépositaires des rituels
et des cultes ainsi que de la science secrète transmise par la
tradition orale. Ogotemmêli est lun dentre eux et
le présent livre relate sa rencontre avec Marcel Griaule et les
entretiens qui sen suivirent. Mais moins dun an plus tard,
le 29 juillet 1947, le vieux Chasseur quittait le monde et Griaule ne
pu poursuivre les recherches entamées avec cet informateur. Dans
une perspective durgence de collecte de la mémoire des
peuples, une phrase dAmadou Hampâté Bâ garde
toute sa pertinence : « quand un ancien meurt, cest
toute une bibliothèque qui brûle ».
Introduction :
Lorsque
Griaule sattache à la rédaction des entretiens quil
a eu avec Ogotemmêli, il a la volonté de « mettre
sous les yeux dun public non spécialiste et sans lappareil
scientifique habituel un travail que lusage réserve aux
seuls érudits » (P 1 / Avant-propos), mais également
doffrir à la mythologie dogon une diffusion comparable
à celle des mythologies antiques. Enfin, il souhaite réhabiliter
les cultures africaines souvent méprisées et simplifiées
en rendant hommage au vieux Chasseur qui avait eu le courage de révéler
au monde blanc « une cosmogonie aussi riche que celle dHésiode »
(P 2 / Avant-propos).
Les références théoriques concrètement formulées
sont plutôt rares en ce sens que lauteur souhaitait une
vulgarisation de son ouvrage (au point quil me semble avoir vu
une seule fois tout au long de louvrage le mot ethnographie
introduction comprise) mais lon ressent une nette inflexion vers
une ethnologie du symbolique (à partir dune anthropologie
religieuse) qui se croise assez facilement avec le structuralisme. Ainsi,
on peut dire que lanalyse de ce corpus symbolique que constitue
la cosmogonie dogon met en évidence un système de classement
et une logique formelle dorganisation et, de fait, des pratiques
symboliques ancestrales qui sétendent à toute la
vie sociale contemporaine observée par lauteur, si bien
que lon peut parler de monographie à propos de loeuvre.
Dailleurs, Griaule termine la rédaction de Dieu deau
en disant quil voudrait rendre hommage au premier Noir qui révéla
au monde Blanc « une métaphysique offrant lavantage
de se projeter en mille rites et gestes sur une scène où
se meut une multitude dêtres vivants » (P 5).
Donc, la problématique pourrait être : « de
quelle manière la vie sociale est sous-tendue par la religion
et lordre symbolique ? ».
Quant au questionnement, il sexprime au fur et à mesure
des révélations dOgotemmêli, mais également
à partir des informations recueillies précédemment
sur le terrain lors de lexpédition Dakar-Djibouti. En effet,
cest le vieux Chasseur qui dirige les entretiens, fonction de
la logique temporelle de son récit mais Griaule pose régulièrement
des questions qui visent à lexhaustivité et à
la cohérence des réponses de son interlocuteur (à
partir du matériel empirique dont lui-même dispose déjà
et de ses interrogations antérieures) pour une organisation ultérieure
du texte.
Lépoque et le courant de pensée : Dieu deau
paraît en 1946 mais il fait suite à de nombreux travaux
et recherches menés sur le terrain (les falaises de Bandiagara)
à partir de 1931, année de départ de la mission
Dakar-Djibouti. Mais, cest au sein de la Société
des Africanistes (1930) et autour de son Journal (1931) que sorganise
sous limpulsion de Griaule la nébuleuse africaniste :
ethnologues, muséographes, administrateurs, missionnaires, voyageurs.
Le début des années trente apparaît alors comme
un moment clé de lhistoire de lafricanisme lors duquel
se constitue une ethnologie originale dont les travaux sur les Dogons
sont à lorigine dune tradition danthropologie
religieuse toujours féconde.
A propos de lenquête, et plus précisément
des entretiens, ils commencent lorsquOgotemmeli demande au jeune
Gana daller chercher celui qui conduit la mission dont il entend
parler depuis quinze ans. Il connaît dautant mieux ce groupe
de Blancs que son ami, le vieil Ambibê Babadyé, informateur
attitré des Masques était venu lui demander conseil et
renseignements à ce propos, car le vieux Chasseur avait la réputation
dêtre devenu « lun des plus puissants esprits
des falaises » (P 14). Celui-ci sétait donc
fait une opinion positive des recherches menées sur le terrain
et voulait instruire les Blancs de son savoir transmis par son grand-père,
puis par son père. Les entretiens auront alors lieu dans la maison
dOgotemmêli, dans le plus grand secret car une des difficultés
de lenquête sera de faire attention à tous, des enfants
au Hogon, de « linconcevable curiosité »
des femmes à la « sottise » des hommes
(P 12). Il fut alors laborieux de trouver lendroit adéquat
qui permettrait de sisoler et plus encore, dêtre systématiquement
attentifs au moindre bruit suspect qui trahirait une présence.
Ainsi, dans presque chacun des chapitres, on parle « dautres
oreilles », parfois immatérielles, il faut alors chuchoter
afin que la voix soit presque imperceptible, surtout lorsquil
sagit dévoquer le Lébé car son prêtre,
le Hogon habite la maison qui se situe derrière celle du vieux
Chasseur (notons également que la discrétion pour évoquer
la cosmogonie est liée au rôle fondamental que joue la
parole chez les Dogon) . Une autre difficulté apparaît
immédiatement à Ogotemmêli, il se demande comment
instruire un Blanc, cette question restera en suspens mais le sergent
Koguem se chargera des traductions lors de ces entretiens libres -chaque
jour, lAveugle décide du thème de la journée
en suivant un ordre précis- mais presque semi-directifs puisque
Griaule relance son interlocuteur et lui pose des questions précises :
il consigne chaque soir le compte-rendu des informations recueillies
dans la journée.
Développement :
La
structure de louvrage suit les entretiens quotidiens : à
un chapitre correspond une journée, il y a donc 33 chapitres
dans Dieu deau. Dans la logique de présentation de la cosmogonie
de son peuple, Ogotemmêli commence donc par les origines de la
création et de lorganisation du monde, ainsi que du rôle
fondateur de la Parole dont traitent 9 chapitres et 3 autres sont plus
spécifiquement attribués au rôle du Verbe. Ensuite,
lors des 8 journées suivantes lauteur et son interlocuteur
établissent les correspondances entre la religion et le sens
attribué à lunivers domestique matériel -
car la maison figure lunion avec Dieu- comme le rôle majeur
des greniers dogons, limportance des emplacements dans une chambre
à coucher, ou encore les significations des ornements rituels
apposés aux murs des lieux de culte et de sacrifice
Puis
il sagira dexplorer de la 21ème à la 24ème
journée la dimension symbolique accordée aux menstruations
et à la circoncision. Enfin, au chapitre n°25 Ogotemmêli
raconte à Griaule « linvention de la mort »
et la relation que les vivants entretiennent avec les défunts
jusquau chapitre n°27. Sensuivent des explications sur
la danse, le feu, les jumeaux et le commerce et pour clore les entretiens,
les signes zodiacaux seront abordés, avant ladieu à
lAveugle. Il apparaît dailleurs à la seule
lecture des titres des chapitres des idées-forces à forte
valeur symbolique (« Le sang des femmes », « Le
culte du feu », « Le verbe, la parure et lamour »
).
De plus, Dieu deau dans sa forme dexposition des recherches
vise à faire une analyse exhaustive des données du terrain :
ici, la religion sera le principe même de tous les éléments
constitutifs du quotidien dogon, des institutions et des techniques
de ce peuple, de la poterie à lenfantement, de la danse
au commerce, des menstruations à lagriculture en passant
par la mort
On retiendra surtout limportance capitale du réseau complexe
et logique des correspondances, de la signification sociale des jumeaux
et des principes dexcision et de circoncision qui sont autant
de « remèdes trouvés par la société
pour pallier lambivalence originelle et assurer la fécondité
de lêtre » (P 2 / Avant-propos), enfin, de celle
de la parole fondatrice qui fait de la civilisation dogon une civilisation
du verbe.
Je vais maintenant développer les aspects du livre qui mont
le plus plu en relevant les éléments relatifs au Nommo
et à deux interprétations symboliques : celles concernant
la Lune et le Soleil.
Le
Dieu deau :
Amma
a créé le Nommo après lexcision de sa partenaire
la Terre, ce qui eu pour effet de faire disparaître la cause du
premier désordre, à savoir la naissance du Chacal. Leau
pénétra dans le sein de la Terre et deux êtres se
modelèrent, ils étaient de couleur verte de la tête
aux reins, ils étaient hommes, tandis que le bas de leur corps
était en forme de serpent. Leurs yeux étaient rouges et
fendus et leur langue, fourchue comme celle des reptiles. Quant à
leurs huit membres, ils étaient souples car ils navaient
pas darticulation. Enfin, lensemble de leur corps était
composé deau, il était vert, lisse et « glissant
comme une surface deau » (P 12).
Le Nommo est présent dans toutes les flaques, les ruisseaux,
la pluie, la salive
Dailleurs, Ogotemmêli emploie
indifféremment le mot « eau » et « Nommo »
pour désigner lun et lautre. Leau est lélément
primordial, cest la force vitale de la Terre car Dieu la
pétrie avec de leau, il a fait le sang avec leau
et le Nommo est également présent dans la pierre car lhumidité
se loge partout. Ainsi, lorsque le Lébé (le plus vieil
homme de la huitième famille et lêtre le plus représentatif
de la Parole), qui fut avalé par le Nommo rend visite au Hogon,
son prêtre, il lui lèche tout le corps et par cette salive,
le Nommo intervient, sincarne dans celui qui devient son avatar
et qui sera reconnu socialement comme tel.
Le Nommo est né parfait (ses huit membres en attestent car ce
chiffre est celui de la perfection) et double car cest le désordre
initial amené par la naissance du chacal condamné à
errer solitaire qui a rendu à tous les hommes leur gémelliparité
originelle et leur androgynie sexuelle, qui leur permet dêtre
à la fois mâle et femelle à leur naissance (jusquà
lexcision et à la circoncision), à la différence
près que le Nommo garde ses deux sexes et quil est en fait
deux créatures. On parle alors deux comme « des
jumeaux célestes » ou encore du « couple
des Nommo ».
Lanimal considéré comme son avatar est le bélier.
Le Nommo sincarne en la bête qui est mâle, sa calebasse
est femelle et lanimal est visible lors des pluies, quand il rejoint
la voûte du ciel. Il est également à limage
du système du monde : dans ce cas, cest la calebasse
qui symbolise le soleil, le corps, cest la terre, et le chanfrein
suggère la lune. Quant aux yeux, ce sont les étoiles des
cieux.
Le rôle qui fut confié aux Nommo par leur père Amma
fut dorganiser lhumanité. Ils créèrent
alors un habit pour leur mère qui était nue et sans parole
depuis la naissance du chacal : il sagissait dun long
vêtement fait de fibres qui tombaient jusquau sol en torsades.
La mère fut ainsi habillée et retrouva la parole que son
enfant lui transmettait du ciel grâce aux tresses (on retrouve
ici limportance du tissage qui préfigure lactivité
symbolique quest lévolution du langage donné
aux hommes).
On retrouve également le Nommo à un moment primordial
de la création de lhumanité : le Forgeron (lancêtre
constructeur) vola un morceau de soleil aux Nommo, car pour réaliser
son oeuvre, le feu lui manquait. Cet évènement fut suivi
dune violente réaction de la créature qui sattaqua
au Forgeron en brûlant ses membres à la hauteur des coudes
et des genoux quil navait pas, car en tant quancêtre,
ses membres étaient souples comme ceux des Nommo. Le Forgeron
reçu ainsi des articulations propres à la nouvelle forme
humaine qui allait se répandre sur Terre et qui était
vouée au travail en tant quoeuvre civilisatrice. En effet,
la Terre souillée par linceste du Chacal fut purifiée :
dans tous les lieux où la culture des sols sest installée,
limpureté a reculé.
Le
Soleil :
Il
fut crée par Amma, le père des Nommo, à lorigine
Dieu unique qui réalisa son uvre à partir dune
technique qui fut la première attestée dans lhistoire
de lhumanité : la poterie. Le Soleil est une poterie
portée au blanc et entourée dune spirale à
huit anneaux de cuivre rouge, qui dépasse en taille le canton
de Sanga.
Le Soleil, cest également le nay, un petit lézard
qui rappelle le prépuce de lhomme circoncis. Les Dogon
pensent que lors du rituel, le prépuce, partie solaire et féminine
de lhomme séchappe et rejoint le sol pour retourner
plus près du Soleil.
Mais lastre est également du cuivre en fusion : à
la manière du métal que lon plonge dans le feu,
il rejette des étincelles semblables à des rayons qui
sont absorbeurs dhumidité. En effet, on aperçoit
les rayons du Soleil clairement seulement lors dorages, lorsque
les nuages se creusent pour les laisser apparaître et absorber
les brumes et les flaques, oeuvre du Bélier céleste, avatar
des Nommo qui vole derrière les nuages et régénère
leau en cuivre et le cuivre en eau.
« Rayons du Soleil » dans la langue de Sanga se
dit mênn di, cest également le nom dune montagne
située à une vingtaine de kilomètres du village
où lon raconte que les âmes des morts se rendent
en groupe afin de se procurer leau changée en cuivre quils
boiront tout au long du voyage qui doit les amener dans le Grand Sud.
La
Lune :
Comme
le Soleil, la Lune fut créée à partir de la poterie,
elle a la même forme que lui mais ses anneaux sont en cuivre blanc.
Si les Noirs avaient été créés à
partir de la lumière du Soleil, les Blancs eux furent extraits
au clair de Lune, ce qui explique leur aspect larvaire.
La Lune na quun rôle mineur pour les Dogon, mais on
la retrouve peinte sur les portes à gauche du Soleil, ronde ou
en croissant et elle symbolise alors lappel à célébrer
les religions célestes que les hommes ne doivent pas oublier.
Elle est également présente sous la forme de peinture
rupestre de couleur blanche sur la façade du Sanctuaire de Binou,
toujours accompagnée du Soleil, mais également détoiles,
danimaux et dhommes, eux aussi peints en blanc.
Ici, elle est la réplique des mouvements et de la couleur qui
anime la Grande Place et la terrasse du Mort afin de permettre au monde
de se perpétuer.
Conclusion :
Je
vais maintenant me pencher sur les apports de cette oeuvre dans lespace
de la recherche, puis à partir de LAfrique fantôme
de Michel Leiris et une partie de Au cur de lethnie de J.L.
Amselle (Ethnies et espaces : pour une anthropologie topologique)
je me livrerai à une critique de loeuvre.
A propos des apports, je peux avancer lidée que les buts
de lauteur ont été atteints. En effet, lui qui souhaitait
« vulgariser » son ouvrage en le rendant ainsi
accessible au plus grand nombre a réalisé ses fins puisquil
a su faire de son oeuvre un récit dépouillé du
langage scientifique, en donnant une dimension imagée à
tous les aspects de la mythologie dogon, notamment grâce aux multiples
schémas qui viennent illustrer les paroles dOgotemmêli.
Ensuite, lautre idée de M. Griaule était déclairer
lOccident sur ses conceptions dune Afrique archaïque
et primitive, aux idées simples et presque sauvages. A la lecture
de Dieu deau, on constate la complexité de la pensée
dogon et létendue dune cosmogonie aussi riche que
cohérente comme lindique le schéma des correspondances
symboliques à la fin du livre (P 222 / 223).
Enfin, du point de vue de la recherche ethnologique, cet ouvrage est
révolutionnaire car il a lavantage de rendre compte de
tous les aspects dordre symbolique et matériel qui déterminent
les conceptions et les pratiques des Dogon, en mettant en avant de nombreuses
interprétations qui font de Dieu deau une des « monographies »
fondatrices du genre. Dailleurs, lun des plus grand mérite
de lauteur en tant que chercheur fût la découverte
des signes zodiacaux : en réfléchissant à
propos du bélier, des jumeaux, du scorpion, des vierges, il se
rendit compte que le zodiaque nétait pas inconnu des Dogon
(même si ils nen avaient pas lutilisation commune
que nous lui connaissons actuellement). Il retrouva alors une trace
interprétative, un chaînon manquant dun système
de signes qui pose encore des difficultés aux chercheurs quant
à son origine, avec la seule connaissance à lépoque
dune large diffusion dans le bassin méditerranéen
sans pouvoir en expliquer les sources.
Notons également que Marcel Griaule a fait construire un barrage
à Sanga qui a permit à la région de prospérer
et que pour lui marquer leur reconnaissance, les Dogon ont enterré
-symboliquement- lauteur comme lun des leurs.
Cependant, la lecture de lAfrique fantôme nous indique dautres
comportements de lauteur qui nuisent à son image et au
contexte du déroulement de lenquête de terrain. Ainsi,
on apprend selon Jean Jamin qui rédige lintroduction de
loeuvre « quun tel sauvetage intellectuel et
muséal seffectua dans bien des cas malgré -parfois
contre- les populations indigènes qui se virent de la sorte doublement
condamnées, par la politique coloniale et par la démarche
ethnographique à nêtre plus que des objets de musée ».
Je rappellerai également que lautorisation du départ
de la mission Dakar-Djibouti fut publiée dans la Revue des affaires
coloniales qui délivra à Griaule un « permis
de capture scientifique » qui spolia les peuples se trouvant
sur la route de la mission de plus de 3600 objets. Enfin, ajoutons à
cela la présence de mitrailleuses aux côtés des
chercheurs, le rachat dune jeune esclave et cette phrase de Griaule :
« les noirs abâtardis par les blancs me dégoûtent ».
On peut alors légitimement se poser la question de léthique
professionnelle de la mission autant que sur ses objectifs réels
lors de la première venue de lauteur à Sanga dans
le cadre de cette même mission.
Ensuite, à partir des critiques sur la notion dethnie de
J.L Amselle, je vais me pencher sur la dimension scientifique de lenquête.
Selon Amselle, « lEcole de Griaule a figé les
sociétés africaines observées dans une mono-appartenance
ethnique en les disjoignant des réseaux englobants dans lesquels
celles-ci sinscrivaient à lépoque précoloniale »
(P V de lintroduction). En effet, que ce soit au niveau des échanges
commerciaux avec le Maghreb, de la diffusion de larabe écrit,
de léchange des femmes depuis plusieurs siècles
et de la véhiculation de lIslam, on ne peut ignorer que
les conceptions religieuses des Dogon et lensemble de leur culture
naient été influencés. « Lidée
pure » dun mythe intrinsèquement lié
au canton de Sanga qui ne tient compte ni des relations transversales
entre les peuples, ni de leffet du temps et de la transmission
orale demande une révision, dautant plus nécessaire
que le livre se base sur le recueil dun seul témoignage
et que lun des reproches quadresse Amselle à lethnologie
africaniste, cest sa confusion en matière de linguistique.
Enfin, plus personnellement, je trouve que la justification de toutes
les institutions dogons par le biais dune interprétation
symbolique systématique est abusive et je regrette également
le manque dexplication sur les raisons de lexcision (alors
quun chapitre entier est consacré à la circoncision)
et de la polygamie.
Eléonore
Chapuis